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Signature des PV : l’attestation A.53-8 ne répare pas l’absence de signature

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Signature des PV : l’attestation A.53-8 ne répare pas l’absence de signature
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1)  Résumé succinct

Parties : M. [J] [R] (mis en examen) c/ Ministère public.

Juridiction  : Cour de cassation, chambre criminelle, 16 septembre 2025, n° 24-87.080

Nature du litige : nullités d’instruction — défaut de signature par l’OPJ de PV (garde à vue, fouille de véhicule, entretien avocat) ; portée d’une attestation de conformité (art. A.53-8 CPP) destinée à la rematérialisation d’actes signés sous forme numérique (art. D.589-2 CPP).

Effet sur la pratique / la jurisprudence : la Crim. rappelle fermement que l’attestation A.53-8 a pour seul objet de préserver la valeur probante après impression de pièces déjà signées numériquement ; elle ne peut pallier un défaut de signature d’un PV par l’OPJ. Pas de nullité néanmoins en l’espèce, faute de grief et au vu d’un PV récapitulatif signé confirmant les diligences (art. 64 CPP).

2) Analyse détaillée

Les faits 

16 juillet 2023 : contrôle routier ; découverte de stupéfiants sur la personne de M. [R] ; saisie d’herbe de cannabis dans son véhicule (fouille).

Mise en examen (stupéfiants, association de malfaiteurs, récidive).

La procédure

27 novembre 2023 : requête en nullité de pièces (défaut de signature OPJ).

23 octobre 2024 : arrêt de la chambre de l’instruction d’Aix-en-Provence rejetant la demande.

10 mars 2025 : examen immédiat du pourvoi (art. 567-1-1 CPP).

16 septembre 2025 : rejet par la chambre criminelle.

Contenu de la décision

Arguments du demandeur

Violation des art. 66, 429 et 493 CPP : défaut de signature des PV (GAV, fouille, entretien avocat) ; l’attestation A.53-8 ne prouve pas qu’il y a eu signature numérique et ne remplace pas la signature du rédacteur ; absence des mentions requises pour l’avis au procureur (art. 62-2, 63, 593 CPP).

Raisonnement de la Cour de cassation

Sur le défaut de signature des PV

Rappel de principe (art. 66 CPP) : les PV dressés par l’OPJ doivent être signés par lui sur chaque feuillet ; l’inobservation de cette formalité, si elle porte atteinte aux intérêts de la personne, est sanctionnée par la nullité. 

Office de l’attestation A.53-8 : elle a pour objet de conférer une valeur probante après impression aux pièces ayant fait l’objet d’un procédé de signature numérique au sens de D.589-2 ; elle ne saurait pallier un défaut de signature du PV par l’OPJ/APJ. 

Application : pas de nullité ici car (i) le PV récapitulatif de GAV — signé par la personne gardée à vue — atteste que les diligences ont été accomplies par un OPJ (conformément à l’art. 64 CPP) ; (ii) le demandeur ne conteste pas la présence des stupéfiants dans le véhicule et n’allègue aucun grief autre que l’existence des poursuites. 

Sur l’avis au procureur (arts. 62-2, 63, 593 CPP)

L’avis « par tout moyen » n’est soumis à aucun formalisme particulier ; la Cour relève que l’avis litigieux mentionne OPJ, service, qualité du magistrat destinataire, heure de GAV, identité, infractions, motifs ; aucun texte n’impose la mention du mode d’information ni l’indication expresse de la juridiction, à peine de nullité. Moyen écarté. Légifrance+2Légifrance+2
Solution retenue : rejet du pourvoi ; régularité formelle de l’arrêt.


3) Références juridiques 

3.1 Jurisprudence 

Cass. crim., 16 sept. 2025, n° 24-87.080, publié 

Jurisprudences antérieures pertinentes (signature / rematérialisation / grief)

Cass. crim., 19 déc. 2023, n° 23-82.116 — Nullité d’un PV (perquisition) : le grief peut être écarté si l’intéressé ne conteste pas la présence/intégrité des objets saisis. 

Cass. crim., 3 sept. 2024, n° 23-86.109 — Défaut de signature et contrôle des juges du fond (rappels).


3.2 Textes légaux 

Art. 66 CPP (signature de l’OPJ sur chaque feuillet) 
Art. 64 CPP (PV récapitulatif de GAV)
Art. 62-2 CPP (définition GAV) 
Art. 63 CPP (placement en GAV / avis au procureur)
Art. 593 CPP (défaut de motifs / nullité) 
Art. A.53-8 CPP (attestation de conformité pour impression d’actes numériquement signés)

Art. D.589-2 CPP (définit les procédés de signature sous forme numérique)

4) Analyse juridique approfondie

a) Portée normative de l’arrêt

Clarification utile : l’attestation A.53-8 n’est pas une preuve qu’un acte a été signé (numériquement) ; elle garantit la fidélité de l’impression d’un acte déjà signé au format numérique (D.589-2). Elle ne « répare » jamais l’absence de signature exigée par l’art. 66 CPP. 

Fil directeur du contrôle : la Crim. articule formalisme (signature) et grief (atteinte aux intérêts) ; à défaut de grief, la nullité n’est pas encourue, surtout lorsqu’un PV récapitulatif signé (art. 64) atteste les diligences et que le mis en cause ne conteste pas les éléments matériels saisis.

b) Mise en perspective avec la jurisprudence antérieure

Sur la rematérialisation / A.53-8 : en 2024, la Crim. a validé l’annulation lorsque le certificat A.53-8 manquait alors que l’acte avait été signé numériquement : sans attestation, plus de force probante après impression. L’arrêt 2025 complète : même avec attestation, elle ne crée pas la signature qui fait défaut. Convergence : A.53-8 sécurise l’impression, pas la signature. 

Sur le grief : continuité avec la Crim. 19 déc. 2023 : pas de nullité si l’irrégularité (défaut de signature d’un PV de perquisition) n’a pas lésé la personne, notamment lorsqu’elle ne conteste pas l’intégrité des saisies. L’arrêt 2025 transpose la logique (GAV/fouille) : absence de grief → pas de nullité. 

Sur la motivation des juges du fond (art. 593 CPP) : la Crim. demeure vigilante, mais ici l’arrêt d’appel offrait des énonciations suffisantes (mentions de l’avis, données essentielles), d’où rejet. 

c) Effets pratiques

Pour les OPJ/APJ : l’exigence de signature demeure cardinale (papier ou numérique). A.53-8 doit être jointe en cas d’impression d’actes numériquement signés, mais ne dispense jamais de la signature initiale. 

Pour la défense : en cas de défaut de signature, articuler un grief concret (identité/qualité du rédacteur, traçabilité de l’acte, contradiction sur la matérialité) ; l’absence de contestation sur les saisies ou un PV récapitulatif signé affaiblit la nullité.
Pour les juridictions : vérifier (i) la présence d’une signature (ou d’une signature numérique valablement recueillie), (ii) la preuve de rematérialisation conforme (A.53-8) en cas d’impression, (iii) le grief. 

5) Accompagnement personnalisé

Pour sécuriser vos moyens de nullité (ou, côté parquet/partie civile, consolider la procédure) :

Audit dossier : vérification exhaustive des signatures (papier/numérique), des attestations A.53-8, et du chaînage probatoire ;
Contentieux pénal : rédaction de requêtes en nullité centrées sur le grief démontré (traçabilité, identité/qualité du rédacteur, contradiction matérielle), ou mémoires en défense exploitant art. 64 (PV récapitulatif signé).

SELARL Philippe GONET (Saint-Nazaire) peut vous accompagner sur ces volets (enquête, instruction, audience).

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