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La SELARL PHILIPPE GONET, cabinet d’avocat à Saint-Nazaire (2 rue du Corps de Garde, 44600), intervient notamment en droit de la famille / divorce et dans les questions patrimoniales liées à la liquidation du régime matrimonial, y compris lorsque la situation comporte des éléments d’extranéité.
1) Résumé
Parties : Mme [F] (épouse [O], demanderesse au pourvoi) c/ M. [O] (défendeur).
Juridiction : Cour de cassation, 1re chambre civile, arrêt du 1er octobre 2025, pourvoi n° 23-17.313, cassation partielle, publié au Bulletin.
Objet : détermination de la loi applicable au régime matrimonial au regard de l’article 4 de la Convention de La Haye du 14 mars 1978.
Idée centrale : on ne peut pas “fabriquer” une première résidence habituelle commune plusieurs années après le mariage si, juste après celui-ci, les époux vivaient dans deux États différents. Dans ce cas, il faut passer au “plan B” de l’article 4 (nationalité commune) puis, à défaut, aux liens les plus étroits.
Effet direct (pratique/jurisprudence) : la Cour verrouille une erreur fréquente : assimiler une installation commune tardive à la “première résidence habituelle après le mariage”.
2) Analyse détaillée
A) Les faits
20 septembre 1994 : mariage en Italie, sans contrat préalable.
Après le mariage (1994) : la cour d’appel constatera que seul le mari (nationalité française) réside et travaille de façon stable en France, tandis que l’épouse (nationalité irlandaise) se trouve à l’étranger (État non précisé dans l’arrêt).
1996 : les époux s’installent ensemble en Arabie saoudite (fait “non contesté” devant les juges).
12 août 2020 : jugement prononçant le divorce.
B) La procédure
Cour d’appel d’Aix-en-Provence, 16 février 2023 (n° 20/08968) : dit la loi saoudienne applicable au régime matrimonial, en retenant que l’Arabie saoudite serait la “première résidence habituelle” (installation commune en 1996).
Pourvoi : deux moyens. La Cour de cassation ne statue pas spécialement sur certains griefs (art. 1014, al. 2 CPC).
Cassation partielle : uniquement sur le chef “loi applicable = saoudienne”, renvoi devant la cour d’appel de Lyon.
C) Contenu de la décision
1) Arguments
Le moyen retenu (1er moyen, 2e branche) soutient que :
si les époux n’ont pas une résidence habituelle dans le même État “juste après” le mariage, et
s’il n’y a pas de nationalité commune,
alors il faut rechercher la loi des liens les plus étroits (dernier alinéa).
2) Raisonnement de la Cour (règle + application)
La Cour rappelle la cascade de l’article 4 (telle que reproduite dans l’arrêt) :
loi de l’État de la première résidence habituelle après le mariage ;
à défaut (si première résidence pas dans le même État) : loi de la nationalité commune ;
à défaut des deux : loi des liens les plus étroits.
Puis elle censure la cour d’appel :
la CA constatait que, après 1994, les époux ne vivaient pas dans le même État ;
elle ne pouvait donc pas qualifier l’installation commune en 1996 de “première résidence habituelle après le mariage”.
3) Solution
Cassation partielle sur la seule loi applicable au régime matrimonial ;
Renvoi à la CA de Lyon ;
dépens à la charge du mari + 3 000 € art. 700 CPC à l’épouse.
3) Références juridiques
3.1 Jurisprudence
Cass. civ. 1re, 1er oct. 2025, n° 23-17.313
Cass. civ. 1re, 14 mai 2014, n° 12-29.922 (inédit) – “première résidence” = résidence immédiatement après le mariage (principe discuté dans le moyen)
Cass. civ. 1re, 12 avr. 2012, n° 10-27.016 (publié) – mutabilité (art. 7 & 8) et absence d’effet rétroactif
Cass. civ. 1re, 12 févr. 2014, n° 12-29.297 (inédit) – conditions de mutabilité automatique (art. 4 & 7)
Décision attaquée (CA Aix-en-Provence, 16 févr. 2023, n° 20/08968)
3.2 Textes légaux
Article 4 – Convention de La Haye du 14 mars 1978 (extrait reproduit mot pour mot dans l’arrêt) :
« Selon ce texte, si les époux n'ont pas, avant le mariage, désigné la loi applicable à leur régime matrimonial, celui-ci est soumis à la loi interne de l'État sur le territoire duquel ils établissent leur première résidence habituelle après le mariage. »
« Toutefois, le régime matrimonial est soumis à la loi interne de l'État de la nationalité commune des époux lorsque les époux n'établissent pas sur le territoire du même État leur première résidence habituelle après le mariage. »
« À défaut de résidence habituelle des époux sur le territoire du même État et à défaut de nationalité commune, leur régime matrimonial est soumis à la loi interne de l'État avec lequel, compte tenu de toutes les circonstances, il présente les liens les plus étroits. »
4) Analyse juridique approfondie
La Cour impose une lecture stricte : pas de résidence commune “après le mariage” = on saute le critère n°1. L’installation commune plus tardive ne “rattrape” pas l’absence de première résidence commune.
A) Le vrai point de droit : “première résidence habituelle” = critère commun
L’article 4 est une règle hiérarchisée : on n’utilise le critère suivant que si le précédent est inapplicable. Ici, le critère “première résidence habituelle” échoue parce que, factuellement, les époux ne se sont pas installés dans le même État après 1994.
B) Ce que la cour d’appel a fait… et pourquoi c’est censuré
La CA a raisonné ainsi : “ils se sont établis ensemble en Arabie saoudite en 1996, donc c’est leur première résidence habituelle”. La Cour de cassation répond : non, car une résidence “première” au sens de la Convention suppose que le critère soit pertinent dès l’après-mariage ; sinon, il faut basculer vers la nationalité commune puis les liens les plus étroits.
C) Comparaison avec la jurisprudence antérieure
En 2014, la 1re civ. a déjà mis l’accent sur l’idée d’une résidence “immédiate” après le mariage, dans le débat sur la qualification de la première résidence.
En 2012 et 2014 (févr.), la Cour travaille la logique “mécanique” de la Convention (articulation art. 4 / 7 / 8) : la règle de conflit n’est pas une appréciation libre, c’est une cascade avec des effets juridiques précis (notamment sur la mutabilité et ses effets dans le temps).
Apport 2025 : la Cour formule nettement une hypothèse pratique très fréquente (couple “séparé géographiquement” au départ) : l’installation commune ultérieure ne suffit pas à faire renaître le critère de la première résidence habituelle.
D) Conséquences concrètes (pour les couples)
Si vous vous mariez sans contrat, puis :
l’un s’installe en France,
l’autre reste à l’étranger,
et vous ne vivez ensemble que plus tard dans un troisième pays,
alors, en cas de divorce/liquidation, le juge doit (en l’absence de nationalité commune) déterminer la loi des liens les plus étroits : centre de vie du couple, localisation des intérêts patrimoniaux, durée et stabilité des installations, etc. (ces critères concrets devront être discutés devant la juridiction de renvoi).
5) Critique de la décision
Identification du seuil d’inapplicabilité : “première résidence” impossible si les résidences initiales sont dans deux États différents.
Restitution de la cascade de l’article 4 et de l’erreur de méthode de la CA.
6) Accompagnement personnalisé (droit de la famille)
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