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Livraison surveillée et fouille d’un conteneur de stupéfiants : pas de perquisition au sens des articles 57 et 96 CPP

Le 10 décembre 2025
Livraison surveillée et fouille d’un conteneur de stupéfiants : pas de perquisition au sens des articles 57 et 96 CPP
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1. Résumé de la décision

1.1 Parties et juridiction
Juridiction : Cour de cassation, chambre criminelle, formation de section 18 novembre 2025  n° 25-80.525 (pourvoi du 24 octobre 2024)
Deuxième pourvoi : pourvoi du 24 décembre 2024 déclaré irrecevable comme tardif
Partie demanderesse : M. K. (mis en examen)
Parties défenderesses : ministère public ; autres mis en examen (non nommés dans le dispositif de cassation)

1.2 Nature du litige

L’affaire s’inscrit dans une information judiciaire ouverte du chef de :

blanchiment aggravé et blanchiment simple,
infractions à la législation sur les stupéfiants,
importation de stupéfiants en bande organisée,
association de malfaiteurs en vue de commettre des infractions à la législation sur les stupéfiants,
corruption active.

Les moyens de cassation portent principalement sur :

Le dessaisissement du juge d’instruction au profit de la JIRS (juridiction interrégionale spécialisée) sur le fondement de l’article 706-77 CPP. Donc

La qualification de l’opération de fouille d’un conteneur renfermant des stupéfiants réalisée dans le cadre d’une livraison surveillée :

perquisition soumise aux articles 57 et 96 CPP ou simple opération de surveillance et de fouille sous l’empire de l’article 706-80 CPP. 

La régularité des mesures de captation de données (article 706-95-18 CPP) et la portée d’éventuelles irrégularités affectant l’ordonnance et la commission rogatoire. 

La désignation d’un service d’expertise (SNPS-LPS) et la question du serment des experts (articles 157-2 et 160 CPP). 


1.3 Effet direct sur la jurisprudence et les pratiques

L’arrêt du 18 novembre 2025 :

Confirme la jurisprudence antérieure sur le dessaisissement au profit de la JIRS : le juge d’instruction peut alerter le parquet sur l’opportunité d’un dessaisissement, à condition que celui-ci résulte formellement de réquisitions du procureur (art. 706-77 CPP). L Je sais pas où je

Affirme clairement que la fouille d’un conteneur réalisée dans le cadre d’une livraison surveillée ne constitue pas une perquisition au sens des articles 57 et 96 CPP, de sorte que les formalités spécifiques (présence et signature de l’occupant ou de témoins) ne s’appliquent pas.

Encadre strictement les nullités en matière de captation de données : l’absence de mention de la durée dans l’ordonnance peut être neutralisée si la commission rogatoire fixe cette durée de manière claire avant la mise en œuvre de la mesure, à condition d’absence de grief.

Précise que lorsqu’un service d’expertise (SNPS-LPS) est désigné (art. 157-2 CPP), c’est l’agent ayant effectivement réalisé l’expertise qui doit prêter serment, et non nécessairement le chef de service.

En pratique, la décision renforce la sécurité juridique des enquêtes complexes en matière de stupéfiants, tout en limitant le champ des nullités opposables par la défense.


2. Analyse détaillée : faits, procédure et contenu de la décision

2.1 Les faits – Chronologie
(En bref : information pénale lourde, livraison surveillée de stupéfiants via un conteneur, mesures intrusives de captation et expertise technique.)

L’arrêt de la Cour de cassation ne contient qu’un rappel succinct des faits ; seuls les éléments suivants peuvent être retenus de façon certaine :

Une information judiciaire a été ouverte des chefs de :

blanchiment aggravé,
blanchiment simple,
infractions à la législation sur les stupéfiants,
importation de stupéfiants en bande organisée,
association de malfaiteurs,
corruption active.

Dans le cadre de cette information, les enquêteurs mettent en œuvre une livraison surveillée (art. 706-80 CPP) visant un conteneur renfermant des produits stupéfiants, avec ouverture du conteneur et saisie des produits.

Des captations de données ont été autorisées sur plusieurs supports, dont des boîtiers téléphoniques (notamment un iPhone appartenant à un tiers, M. J.).

Une expertise technique a été ordonnée et confiée au SNPS-LPS (service national de la police scientifique), sur le fondement des articles 157-2 et 160 CPP.

Les dates procédurales précises (dessaisissement, captation, expertise) sont indiquées dans l’arrêt et structurent la procédure plus que les faits matériels de l’infraction.

2.2 La procédure – Du juge d’instruction local à la Cour de cassation

(En bref : dessaisissement au profit de la JIRS, requête en nullité, arrêt de la chambre de l’instruction, pourvoi en cassation.)

D’après l’arrêt attaqué et les mentions de l’arrêt de cassation :

Information initiale et dessaisissement

Le 7 septembre 2022, le juge d’instruction saisi indique aux enquêteurs qu’il envisage de saisir le procureur de la République en vue d’un dessaisissement au profit de la JIRS, puis rend le même jour une ordonnance de soit-communiqué en ce sens.

Le 19 septembre 2022, le procureur de la République adresse des réquisitions au juge d’instruction, sollicitant formellement le dessaisissement au profit de la JIRS en application de l’article 706-77 CPP.

Le juge d’instruction se dessaisit ensuite au profit de la juridiction spécialisée (date mentionnée dans l’arrêt, bien que l’année « 2024 » puisse apparaître comme une coquille matérielle).

Mesures de captation de données

Le 11 octobre 2022, le juge d’instruction rend une ordonnance de captation de données et signe une commission rogatoire adressée aux enquêteurs :

l’ordonnance ne mentionne pas explicitement la durée de la mesure,

la commission rogatoire fixe une durée de quatre mois, expirant le 11 février 2023, soit avant le début effectif de la captation.

Mise en examen et requête en nullité

M. K. est mis en examen le 15 décembre 2023.

Le 3 juin 2024, il dépose devant la chambre de l’instruction de la cour d’appel de Douai une requête en nullité visant :

l’ordonnance de captation et la commission rogatoire,

le procès-verbal de pose du dispositif technique,

certains actes liés à la livraison surveillée du conteneur,

des actes relatifs à l’expertise du SNPS-LPS,

et la régularité du dessaisissement au profit de la JIRS.

Arrêt de la chambre de l’instruction (Douai, 16 octobre 2024)

Par arrêt du 16 octobre 2024, la chambre de l’instruction rejette la plupart des demandes de nullité et valide la procédure.

Pourvois en cassation

M. K. forme un premier pourvoi le 24 octobre 2024 (n° 25-80.525), admis et examiné.
Un second pourvoi, formé le 24 décembre 2024 contre le même arrêt, est déclaré irrecevable comme tardif.

Arrêt de la Cour de cassation (18 novembre 2025)

La Cour de cassation :

déclare irrecevable le second pourvoi,
rejette le pourvoi principal,
confirme ainsi l’arrêt de la chambre de l’instruction.

2.3 Contenu de la décision : arguments, raisonnement, solution

2.3.1 Dessaisissement au profit de la JIRS (art. 706-77 CPP)

Argument du demandeur
M. K. soutient que :

Le juge d’instruction ne peut se dessaisir au profit de la JIRS que sur réquisitions du procureur (art. 706-77 CPP). 

En prenant l’initiative, le 7 septembre 2022, d’indiquer par ordonnance son intention de se dessaisir, le juge aurait méconnu le texte en « provoquant » les réquisitions du ministère public.

Raisonnement de la Cour

La Cour de cassation rappelle que l’article 706-77 CPP impose que le dessaisissement lui-même soit ordonné sur réquisitions du procureur de la République. 


Constate :

que le juge d’instruction s’est borné, par une ordonnance de soit-communiqué, à attirer l’attention du parquet sur la complexité du dossier et la pertinence d’une saisine de la JIRS,

que le dessaisissement effectif a été pris postérieurement, sur réquisitions formelles du procureur en date du 19 septembre 2022.

Solution

La Cour juge que :

Le juge d’instruction pouvait légitimement suggérer un dessaisissement au parquet sans méconnaître l’article 706-77 CPP ;
La procédure de dessaisissement reste régulière dès lors que :

le parquet conserve l’initiative juridique,
l’ordonnance de dessaisissement est bien prise sur réquisitions.
Le moyen est donc rejeté.


Convergence avec la jurisprudence antérieure :

Cass. crim., 12 nov. 2015, n° 15-82.832, a déjà admis qu’un juge d’instruction peut communiquer le dossier au parquet pour l’alerter sur l’opportunité d’un dessaisissement au profit d’une JIRS, dès lors que la décision de dessaisissement repose ensuite sur des réquisitions régulières. 


2.3.2 Livraison surveillée et fouille du conteneur : perquisition ou simple surveillance ?

Argument du demandeur

M. K. invoque la nullité de la fouille du conteneur et des saisies subséquentes en soutenant que :

l’ouverture du conteneur renfermant les stupéfiants devrait être regardée comme une perquisition au sens des articles 57 et 96 CPP ; 
dès lors, la mesure aurait dû être accomplie :

en présence de la personne chez laquelle elle se déroule ou de témoins,
avec signature du procès-verbal par ces personnes,
faute de quoi les actes seraient nuls.

Raisonnement de la Cour

La chambre criminelle :

Rappelle que l’opération litigieuse a été conduite dans le cadre d’une livraison surveillée au sens de l’article 706-80 CPP.

Retient que :

l’ouverture du conteneur renfermant les stupéfiants,
ainsi que les saisies et prélèvements réalisés à cette occasion,
ne relèvent pas du régime des perquisitions visées aux articles 57 et 96 CPP.

Précise que :

la régularité de ces opérations est appréciée au regard des textes spéciaux sur la surveillance (art. 706-80 et s.),
les contestations relatives à la valeur probatoire des saisies peuvent être discutées devant la juridiction de jugement, dans le cadre du débat contradictoire.

Solution
La Cour juge que :

La fouille du conteneur, lorsqu’elle s’inscrit dans une livraison surveillée autorisée, est une opération de surveillance et de saisie régie par l’article 706-80 CPP,
Les articles 57 et 96 CPP ne s’appliquent pas à cette opération,
Aucune nullité ne peut être tirée de l’absence de formalités propres à la perquisition,

Le moyen est rejeté.
Éclairage jurisprudentiel :

Cass. crim., 23 nov. 2016, n° 16-81.904 (conteneur de cocaïne au Havre) a déjà admis la mise en œuvre d’une livraison surveillée après fouille et saisie dans un conteneur, dans un schéma proche, pour une importation de cocaïne depuis le Pérou. 

Cass. crim., 15 mars 2017, n° 16-86.363, a rappelé que la surveillance d’un convoi de stupéfiants sur le fondement de l’article 706-80 CPP, suivie de perquisitions et saisies, peut être validée dès lors que la flagrance et les conditions de surveillance sont régulièrement caractérisées. 


2.3.3 Captation de données : irrégularité sans grief

Argument du demandeur
M. K. soutient que la captation de données (art. 706-95-18 CPP) serait entachée de nullité car :

l’ordonnance du 11 octobre 2022 ne mentionne pas la durée de la mesure,
le texte exige que la durée soit fixée par la décision d’autorisation,
la seule mention dans la commission rogatoire ne suffirait pas.

Raisonnement de la Cour

La Cour constate :

l’absence de mention de la durée dans l’ordonnance,
mais la présence d’une limite temporelle claire (quatre mois) dans la commission rogatoire,
cette commission est signée avant le début des opérations de captation.

Elle considère que :

l’ordonnance et la commission rogatoire forment un ensemble indivisible,
l’exigence d’une durée déterminée a été satisfaite en pratique,
le demandeur ne démontre aucun grief concret (par exemple, dépassement de la durée ou atteinte substantielle aux droits de la défense).

Solution

L’irrégularité formelle (absence de mention de durée dans l’ordonnance) est constatée,
Mais faute de grief, aucune nullité n’est prononcée,
Le moyen est rejeté.

2.3.4 Qualité pour contester une captation visant le téléphone d’un tiers

L’un des moyens visait la captation de données réalisée sur un iPhone appartenant à un tiers (M. J.), en discutant la qualité de M. K. pour en demander l’annulation.

La chambre de l’instruction avait écarté la qualité à agir de M. K.

La Cour de cassation relève que la chambre de l’instruction a insuffisamment répondu à l’argument selon lequel la captation portait atteinte à la vie privée du demandeur.

Elle considère toutefois que cette insuffisance de réponse ne justifie pas la cassation, dans la mesure où des moyens similaires relatifs aux captations visant M. K. ont déjà été rejetés et qu’aucune atteinte supplémentaire déterminante n’est caractérisée.

En substance, la Cour opère un contrôle minimal et ne casse pas, mais l’arrêt laisse entrevoir que la qualité pour agir peut exister dès qu’une mesure de captation affecte la sphère de vie privée d’une personne, même si le support matériel appartient à un tiers.

2.3.5 Expertise SNPS-LPS et serment des experts

Argument du demandeur
M. K. reproche à la chambre de l’instruction d’avoir validé l’expertise confiée au SNPS-LPS alors que :

ce service aurait été désigné sans respecter les règles des expertises (art. 157-2 et 160 CPP),
le chef de service n’aurait pas prêté serment,
les agents intervenus n’auraient pas été régulièrement désignés.

Raisonnement de la Cour

Elle rappelle que l’article 157-2 CPP permet au juge d’instruction de désigner un service ou un organisme aux fins d’expertise. 

Ce service désigne alors une ou plusieurs personnes pour exécuter la mission.
L’article 160 CPP prévoit que l’expert prêtant serment est celui qui réalise effectivement l’expertise ; le serment n’a pas à être prêté par le chef de service si celui-ci ne réalise pas l’examen. 

Solution

La Cour valide la désignation du SNPS-LPS comme service d’expertise,
considère que le serment exigé concerne uniquement la personne qui réalise l’analyse,
et rejette le moyen de nullité.

2.3.6 Autres moyens

Plusieurs moyens (troisième, sixième, huitième, neuvième branche de certains moyens) sont déclarés non admis, car non de nature à entraîner l’admission du pourvoi, selon la formule habituelle de l’article 567-1-1 CPP.

3. Références juridiques – Textes et jurisprudence

3.1 Textes applicables 


Article 57 CPP – Perquisitions au domicile, présence de l’occupant

Article 96 CPP – Perquisition chez un tiers

Article 706-80 CPP – Livraison surveillée / surveillance élargie

Article 706-77 CPP – Dessaisissement au profit de la JIRS

Article 706-95-18 CPP – Captation de données (avant réforme de 2025)

Article 157-2 CPP – Désignation des experts et services d’expertise

Article 160 CPP – Serment et mission des experts


3.2 Jurisprudence citée et comparée

Cass. crim., 18 nov. 2025 n° 25-80.525

Cass. crim., 23 nov. 2016n° 16-81.904
Importation de cocaïne en conteneur, tentative de livraison surveillée, fouille au port du Havre

Cass. crim., 15 mars 2017 n° 16-86.363
Livraison surveillée d’un convoi de stupéfiants, flagrance et nullité

Cass. crim., 12 nov. 2015 n° 15-82.832
Dessaisissement au profit d’une JIRS, article 706-77 CPP

Cass. crim., 23 avr. 2013 n° 13-80.639
Retenue douanière, contrôle d’un conteneur, articulation retenue/garde à vue


4. Analyse juridique approfondie

4.1 Dessaisissement JIRS : continuité jurisprudentielle

L’arrêt de 2025 s’inscrit dans la droite ligne de Cass. crim., 12 nov. 2015, n° 15-82.832, en validant le schéma suivant : 

Le juge d’instruction de droit commun peut, par une ordonnance de soit-communiqué,

attirer l’attention du parquet sur la complexité de l’affaire,
suggérer un dessaisissement au profit de la JIRS.


Il ne peut toutefois se dessaisir qu’« sur réquisitions » du procureur (art. 706-77 CPP).

La Cour de cassation vérifie que :

le juge n’a pas imposé le dessaisissement,
les réquisitions du parquet sont réelles, datées, motivées,
l’ordonnance de dessaisissement vise ces réquisitions.

Pour la pratique :

Les avocats doivent systématiquement vérifier les dates et le contenu :

de l’ordonnance de soit-communiqué,
des réquisitions du parquet,
de l’ordonnance de dessaisissement.
La nullité est encore possible :

si le juge se dessaisit sans réquisitions,
ou si les réquisitions sont postérieures ou manifestement fictives.
Ici, au contraire, le dossier montre une séquence régulière, ce qui justifie le rejet du moyen.

4.2 Livraison surveillée et conteneur : un régime autonome hors perquisition
La décision de 2025 opère une clarification importante :

La fouille d’un conteneur dans une livraison surveillée est une opération de surveillance (art. 706-80 CPP) et non une perquisition classique.

Conséquences concrètes :

Pas d’application des articles 57 et 96 CPP (présence obligatoire de l’occupant, témoins, signatures).

La défense ne peut plus plaider la nullité de cette fouille sur ce seul fondement.

Le débat se déplace :

vers la régularité de l’autorisation de livraison surveillée (conditions de l’art. 706-80 CPP),

vers la proportionnalité et la fiabilité des opérations de saisie, discutées devant le tribunal ou la cour d’assises.

Cette approche est cohérente avec :

Cass. crim., 23 nov. 2016 (16-81.904), qui admettait déjà le recours à des livraisons surveillées dans des dossiers de conteneurs,
Cass. crim., 15 mars 2017 (16-86.363), qui validait un dispositif de surveillance sur convoi, fondé sur 706-80, aboutissant à des perquisitions et saisies régulières. 


Pour la stratégie de défense :

Il devient plus difficile de faire annuler la fouille d’un conteneur en invoquant les articles 57 et 96 CPP ;

Il reste toutefois possible de viser :

l’absence d’une véritable autorisation conforme à 706-80,
un détournement de procédure (livraison surveillée fictive servant de paravent à une perquisition),
l’exploitabilité des preuves au regard du procès équitable (art. 6 CEDH), argument à développer devant le juge du fond même en l’absence de nullité.

4.3 Captation de données : contrôle formel vs. grief

L’arrêt illustre un mouvement jurisprudentiel constant :

Les manquements formels aux exigences de certains articles (ici 706-95-18 CPP) ne suffisent pas en eux-mêmes à entraîner la nullité ;

Il faut démontrer un grief, c’est-à-dire  une atteinte concrète aux droits de la défense ou un dépassement des prérogatives légalement fixées. 


Dans le cas d’espèce :

l’ordonnance est imparfaite (durée non mentionnée),
mais la commission rogatoire fixe précisément la durée à quatre mois,
cette commission a été notifiée avant le début de la mesure,
la durée n’a pas été dépassée.

En pratique :

Pour contester ce type de mesures, la défense doit :

croiser les dates de l’ordonnance, de la commission rogatoire et du début effectif des captations,
rechercher tout dépassement de durée ou extension de la mesure au-delà de ce qui était autorisé,
montrer en quoi la mesure a porté une atteinte concrète aux droits du mis en examen.

4.4 Qualité pour agir et atteinte à la vie privée

Même si la Cour ne casse pas, son raisonnement laisse transparaître une idée importante :

la qualité pour contester une mesure de captation peut exister :

non seulement pour le titulaire du support (propriétaire du téléphone),
mais aussi pour toute personne directement visée par la captation, dès lors qu’il y a atteinte à sa vie privée.

Pour la défense, c’est un levier :

il est possible d’invoquer la qualité à agir en montrant que la mesure a capté des échanges sensibles impliquant le demandeur (conversations, données personnelles), même si le support est au nom d’un tiers.

4.5 Expertise SNPS-LPS : clarification sur le serment des experts

En confirmant la régularité de l’expertise confiée au SNPS-LPS, la Cour :

admet la désignation d’un service plutôt qu’un expert nommément désigné (art. 157-2 CPP),
précise que le serment requis par l’article 160 CPP doit être prêté par :

la personne physique qui réalise l’expertise,
et non systématiquement par le chef de service. 

En pratique défense :

La contestation pourra viser :

l’absence de preuve que l’agent ayant matériellement réalisé l’analyse a prêté serment,
un mélange entre activité de police technique et véritable expertise (risque de confusion entre 706-56 CPP et 157-2 CPP).

5. Critique de la décision

Points forts de la décision :

Cohérence avec la construction progressive de la procédure de criminalité organisée :

dessaisissement JIRS sécurisé,
livraison surveillée clairement distinguée de la perquisition.
Sécurisation des techniques spéciales (captation, expertise scientifique) :

le droit de la preuve pénale gagne en prévisibilité.


Points critiquables :

La distinction entre fouille d’un conteneur et perquisition peut apparaître, pour la défense, comme une restriction des garanties procédurales (absence de témoins, signatures, etc.).
L’exigence de grief en matière de captation de données favorise une approche assez formaliste : si la durée est en réalité respectée, la sanction de nullité reste très difficile à obtenir, même en présence d’une irrégularité d’apparence grave.

L’arrêt du 18 novembre 2025 :

Confirme la jurisprudence antérieure (2013–2017) sur les conteneurs, les livraisons surveillées et la flagrance ;

Solidifie le cadre des JIRS et du dessaisissement (706-77 CPP) ;

Renforce une tendance de fond : les nullités de procédure sont de plus en plus difficiles à faire prospérer, sauf atteinte très concrète aux droits de la défense.


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