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1. Résumé succinct
Parties : CPAM d’Eure-et-Loir (demanderesse au pourvoi) c/ Novandie (SNC) (défenderesse à la cassation).
Juridiction : Cour de cassation, 2e chambre civile, formation restreinte – arrêt n° 833 F-B, 11 sept. 2025, pourvoi n° 23-14.491,
Nature du litige : Péremption d’instance en procédure orale (sécurité sociale) devant la cour d’appel : fallait-il imposer aux parties de demander la fixation pour interrompre la péremption ?
Effet direct sur la pratique : La 2e civ. confirme et précise le revirement de 2024 : en procédure orale, une fois les formalités de l’art. 932 CPC accomplies, et sauf diligence particulière imposée par la cour, la direction de la procédure échappe aux parties ; aucune obligation de demander la fixation pour interrompre la péremption.
2. Analyse détaillée
Les faits
2 oct. 2017 : accident du travail de M. [Y], salarié de Novandie ; prise en charge par la CPAM d’Eure-et-Loir.
23 févr. 2018 : recours employeur devant la CRA.
14 nov. 2018 : saisine du TASS (devenu pôle social).
13 juil. 2020 : appel de la CPAM.
6 sept. 2022 : convocation du greffe fixant l’audience au-delà de deux ans.
4 nov. 2022 / 9 déc. 2022 : premières conclusions CPAM / employeur.
Ces éléments de fait ressortent de l’arrêt attaqué tel que reproduit par la Cour de cassation.
La procédure
CA Rouen, 10 févr. 2023 (n° 20/02245) : péremption constatée ; pour la cour d’appel, les parties devaient soit conclure avant 13 juil. 2022, soit solliciter une fixation avant ce terme.
Pourvoi de la CPAM : violation des art. 386 CPC et 6 § 1 CEDH ; en procédure orale et sans représentation obligatoire, la convocation relève du greffe ; les parties ne contrôlent pas le calendrier.
Cassation : renvoi CA Caen.
Contenu de la décision
Arguments des parties
CPAM : en procédure orale, après les formalités de l’art. 932 CPC, aucune diligence n’est exigible avant la convocation ; imposer une demande de fixation serait contraire à l’art. 386 CPC et à l’art. 6 § 1 CEDH.
Novandie : défense tenant à l’inertie des parties sur 2 ans et à l’absence de fixation avant l’échéance. (Reconstitué du motif de la CA tel que visé par l’arrêt.)
Raisonnement de la Cour de cassation
Textes visés : art. 386, 446-1, 932, 936, 937 CPC.
Règle :
Procédure orale (art. 446-1 CPC) : les parties ne sont pas tenues de conclure avant l’audience, sauf organisation des échanges par le juge (art. 446-2 CPC).
Après l’art. 932 CPC (déclaration d’appel) et sauf diligence particulière mise à leur charge, la direction de la procédure échappe aux parties (information/convocation = greffe, art. 936-937 CPC).
Conséquence : Il ne peut être imposé aux parties de solliciter la fixation à seule fin d’interrompre la péremption (art. 386).
Application : la CA a exigé à tort une diligence (conclure ou demander fixation) non mise à la charge des parties ; violation des textes ; cassation.
Solution retenue
Cassation totale, renvoi CA Caen, dépens à la charge de Novandie, 3 000 € au titre de l’art. 700 CPC pour la CPAM.
3. Références juridiques
3.1 Jurisprudence
Cass. civ. 2e, 11 sept. 2025, n° 23-14.491 (F-B)
Cass. civ. 2e, 7 mars 2024, n° 21-19.475
Cass. civ. 2e, 7 mars 2024, n° 21-19.761
Cass. civ. 2e, 7 mars 2024, n° 21-20.719
Cass. civ. 2e, 10 oct. 2024, n° 22-12.882
Cass. civ. 2e, 10 oct. 2024, n° 22-20.384
Remarque : la Cour a elle-même rattaché l’arrêt du 11-09-2025 aux décisions du 7-03-2024 et du 10-10-2024, confirmant la ligne jurisprudentielle.
3.2 Textes légaux
Art. 386 CPC – « L’instance est périmée lorsque aucune des parties n’accomplit de diligences pendant deux ans. »
Art. 446-1 CPC – « Les parties présentent oralement à l’audience leurs prétentions et les moyens à leur soutien. […] »
Art. 932 CPC – « L’appel est formé par une déclaration que la partie ou tout mandataire fait ou adresse, par pli recommandé, au greffe de la cour d’appel. »
Art. 936 CPC – « Dès l’accomplissement des formalités par l’appelant, le greffe avise, par tous moyens, la partie adverse de l’appel […] »
Art. 937 CPC – « Le greffier de la cour convoque le défendeur à l’audience prévue pour les débats […] »
4. Analyse juridique approfondie
Décryptage du raisonnement
La 2e civ. articule les textes : en procédure orale, l’initiative et la temporalité des échanges n’appartiennent pas aux parties tant que le juge/greffe n’a pas organisé la procédure (art. 446-1, 936-937 CPC). Dès lors, l’inaction “imputable aux parties” (condition de la péremption, art. 386) fait défaut en l’absence d’une diligence expressément imposée (ex. calendrier, injonction). L’arrêt interdit de créer une obligation prétorienne de demande de fixation dont l’unique objet serait d’interrompre la péremption.
Comparaison avec la jurisprudence antérieure
7 mars 2024 (4 arrêts) : revirement majeur ; la péremption ne court plus contre les parties après accomplissement des charges procédurales qui leur incombent, sauf diligence spéciale du conseiller de la mise en état/juge.
10 oct. 2024 (2 arrêts) : extension/clarification en procédure orale : la direction relevant du greffe/juridiction, aucune diligence n’est exigible « en vue de l’audience ».
11 sept. 2025 (présent arrêt) : consolidation : la Cour censure expressément l’exigence de demande de fixation comme diligence interruptive autonome.
Évolutions de pratique
Sécurité : en procédure orale sans représentation obligatoire, ne pas exiger de « demande de fixation » de principe.
Surveillance : rester attentif à toute décision d’organisation (calendrier, injonction) : seules ces diligences interrompent la péremption.
Rédaction des écritures : en cas d’exception de péremption soulevée par l’adversaire, opposer le triptyque 446-1 / 936 / 937 + revirement 2024 + présent arrêt.
5.Critique de la décision
La solution renforce la sécurité procédurale et réduit le contentieux artificiel de la péremption.
Synthèse : cohérence avec l’objectif de bonne administration de la justice (maîtrise du rôle par la juridiction).
Documentation : doctrine et actualités (non citées comme sources principales) confirment la portée pratique du revirement et de sa consolidation.
6. Accompagnement personnalisé
La SELARL Philippe GONET (Saint-Nazaire) peut :
Auditer vos dossiers d’appel/procédure orale exposés à une exception de péremption.
Rédiger des conclusions en réponse (moyens textuels + grille “diligences imputables / non imputables”).
Former vos équipes sur la cartographie des diligences interruptives post-revirement.