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Filiation internationale : GPA et limites de l'exequatur en France clarifiées

Le 21 janvier 2025
Filiation internationale : GPA et limites de l'exequatur en France clarifiées
Reconnaissance de filiation internationale - Exequatur et GPA - Adoption plénière - Ordre public international français - Droit de la famille - Gestation pour autrui France

Le 14 novembre 2024, la Cour de cassation (pourvoi n° 23-50.016) a rendu une décision majeure concernant la reconnaissance en France de la filiation établie à l’étranger dans le cadre d’une gestation pour autrui (GPA). Cette décision clarifie les limites de l’ordre public international en matière de filiation et d’adoption.


Les faits
Mme [S] a obtenu, en 2021, une décision de la Cour suprême de Colombie-Britannique (Canada) établissant qu’elle était l’unique parent d’un enfant né par GPA, avec des gamètes de tiers donneurs. La mère porteuse avait renoncé à ses droits parentaux après la naissance.

Mme [S] a demandé à la justice française de reconnaître cette décision à travers une procédure d’exequatur et d’en déduire les effets d’une adoption plénière. La Cour d’appel de Paris avait accordé ces demandes, décision contestée par le procureur général.


Le raisonnement de la Cour de cassation
Respect de l’ordre public international : La Cour a rappelé que la reconnaissance en France d’une filiation établie à l’étranger par GPA n’est pas, en soi, contraire à l’ordre public international, même en l’absence de lien biologique entre le parent d’intention et l’enfant.


Effets limités de l’exequatur : L’exequatur d’un jugement étranger permet la reconnaissance de la filiation à condition qu’elle respecte les principes fondamentaux du droit français. Toutefois, cette reconnaissance ne peut transformer une filiation en adoption plénière si ce n’était pas l’objet du jugement étranger.

Encadrement strict : La Cour a établi que les juges doivent s’assurer de la conformité de la décision étrangère à l’ordre public international et vérifier que toutes les parties à la convention de GPA, notamment la mère porteuse, ont donné leur consentement libre et éclairé.

Interdiction de requalification : En reconnaissant les effets d’une adoption plénière à un jugement étranger qui ne portait que sur la filiation, la Cour d’appel avait outrepassé ses compétences. La Cour de cassation a cassé cette partie de la décision.

Conséquences juridiques

Clarification des principes de l’ordre public international : Cette décision réaffirme que l’ordre public français n’interdit pas la reconnaissance des filiations internationales issues de GPA, à condition que les procédures soient transparentes et respectueuses des droits des parties impliquées.

Limitation des effets de l’exequatur : L’exequatur ne peut conférer des effets juridiques non prévus dans le jugement étranger, préservant ainsi l’autonomie des systèmes juridiques.

Protection des droits des enfants : La décision met l’accent sur l’intérêt supérieur de l’enfant, en garantissant la reconnaissance de ses liens de filiation sans pour autant contourner les règles nationales sur l’adoption.

Conclusion

Cette affaire illustre l’équilibre que doivent maintenir les juridictions françaises entre respect des systèmes juridiques étrangers et protection des principes fondamentaux du droit français. La reconnaissance des filiations internationales continue d’évoluer, en s’inscrivant dans une logique de transparence et de respect des droits des enfants et des familles.

Cass 1ere civ 14 nov 2024 n°+23-50.016

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