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Droit de la preuve et la loyauté de la preuve en matière de procès civil

Le 16 avril 2024
Droit de  la preuve et la loyauté de la preuve en matière de procès civil
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Un homme est engagé à compter du 14 octobre 2013 en qualité de responsable commercial « grands comptes ». Il a été convenu entre les parties qu'il exercerait son activité depuis son domicile.

Le 28 septembre 2016, au terme d'un entretien informel, il a été mis à pied à titre conservatoire et convoqué à un entretien préalable à un éventuel licenciement, lequel s'est tenu le 7 octobre 2016.

Le 16 octobre 2016, il a été licencié pour faute grave.

L'employeur a saisi la juridiction prud'homale aux fins entre autres de condamnation du salarié à des dommages et intérêts pour non-exécution du préavis et en réparation d'un préjudice commercial.

Le salarié a contesté son licenciement et demandé la condamnation de l'employeur à lui payer diverses sommes.

 

L’employeur avait vu déclarer irrecevables les éléments de preuve obtenus par lui au moyen d'enregistrements clandestins, conduisant à un licenciement sans cause réelle et sérieuse, , alors que selon lui  « l'enregistrement audio, même obtenu à l'insu d'un salarié, est recevable et peut être produit et utilisé en justice dès lors qu'il ne porte pas atteinte aux droits du salarié, qu'il est indispensable au droit à la preuve et à la protection des intérêts de l'employeur et qu'il a pu être discuté dans le cadre d'un procès équitable.

La Cour de Cassation va rappeler un certain nombre de principes.

 

En matière pénale, aucune disposition légale ne permet au juge répressif d'écarter les moyens de preuve produits par des particuliers au seul motif qu'ils auraient été obtenus de façon illicite ou déloyale (v. notamment, Crim. 11 juin 2002, n° 01-85.559, Bull. crim. 2002, n° 131), le principe de loyauté de la preuve s'imposant, en revanche, aux agents de l'autorité publique (Ass. plén., 10 novembre 2017, n° 17-82.028, Bull. Ass. plén. 2017, n° 2).

Il y a lieu de considérer désormais que, dans un procès civil, l'illicéité ou la déloyauté dans l'obtention ou la production d'un moyen de preuve ne conduit pas nécessairement à l'écarter des débats. Le juge doit, lorsque cela lui est demandé, apprécier si une telle preuve porte une atteinte au caractère équitable de la procédure dans son ensemble, en mettant en balance le droit à la preuve et les droits antinomiques en présence, le droit à la preuve pouvant justifier la production d'éléments portant atteinte à d'autres droits à condition que cette production soit indispensable à son exercice et que l'atteinte soit strictement proportionnée au but poursuivi.

En l'espèce, pour déclarer irrecevables les pièces litigieuses, après avoir relevé que celles-ci constituent des transcriptions d'enregistrements clandestins des entretiens des 28 septembre et 7 octobre 2016, l'arrêt retient qu'ayant été obtenues par un procédé déloyal, elles doivent être écartées des débats.

En statuant ainsi, la Cour de cassation a relevé que la cour d'appel, à qui il appartenait de procéder au contrôle de proportionnalité a violé les textes susvisés.

En effet il y a lieu de considérer désormais que, dans un procès civil, l'illicéité ou la déloyauté dans l'obtention ou la production d'un moyen de preuve ne conduit pas nécessairement à l'écarter des débats.

 

Le juge doit, lorsque cela lui est demandé, apprécier si une telle preuve porte une atteinte au caractère équitable de la procédure dans son ensemble, en mettant en balance le droit à la preuve et les droits antinomiques en présence, le droit à la preuve pouvant justifier la production d'éléments portant atteinte à d'autres droits à condition que cette production soit indispensable à son exercice et que l'atteinte soit strictement proportionnée au but poursuivi.

Ainsi se pose la question entre le droit de la preuve et la loyauté de la preuve.

Le juge va donc devoir exercer un contrôle in concreto des éléments de preuve versés aux débats non seulement sur leur pertinence également sur les moyens utilisés pour les obtenir.

Cass ass plen 22 déc 2023 n°20-20.648

https://www.courdecassation.fr/decision/65855660673fa80008f8d98d

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