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1. Résumé succinct
Parties :
• Demanderesse au pourvoi : Inter gestion REIM (société de gestion de portefeuille).
• Défenderesse : SCPI Pierre Investissement 6, représentée par un mandataire ad hoc.
Juridiction : Cour de cassation, chambre commerciale, formation restreinte – 17 septembre 2025 – n° 24-14.271 – Arrêt n° 454 F-B – Publié au Bulletin – ECLI: FR:CCASS:2025:CO00454.
Nature du litige : Opposabilité à la société de gestion d’une modification statutaire (AG du 27.06.2018) réduisant la rémunération prévue aux statuts (commission de cession ramenée de 6 % à 0,6 % et suppression d’une rémunération de liquidateur).
Effet direct sur la pratique : La modification statutaire fixant la rémunération de la société de gestion d’une SCPI n’a pas à être agréée par la société de gestion et lui est opposable, sur le fondement de l’art. 422-198 du RG AMF. Légifrance
2. Analyse détaillée
Les faits
Statuts : les art. 18 et 31 des statuts de la SCPI fixaient la rémunération d’Inter gestion ; l’art. 22 renvoyait à une AGE pour toute modification.
27 juin 2018 : AG mixte de la SCPI modifiant la rémunération : commission de cession d’immeubles abaissée de 6 % à 0,6 % (art. 18) et suppression d’une rémunération de liquidateur (art. 31).
Assignation : Inter gestion assigne la SCPI pour inopposabilité de cette modification à son égard.
La procédure
CA Paris (pôle 5, ch. 10), 8 janv. 2024, n° 21/09269 : déclare opposable à Inter gestion la modification statutaire et ordonne de procéder, le cas échéant, à la modification approuvée le 27.06.2018. Décision disponible via le portail officiel.
Pourvoi : Inter gestion forme le pourvoi n° 24-14.271. Débats du 17 juin 2025 ; arrêt de rejet le 17 sept. 2025.
Les moyens
Moyen principal (1re branche) : la société de gestion invoque la stipulation pour autrui (anc. art. 1121 c. civ., aujourd’hui art. 1205 s.), soutenant que la clause statutaire de rémunération créerait un droit irrévocable à son profit après acceptation, faisant obstacle à une modification unilatérale par l’AG sans son agrément. Sont visés l’art. 422-198 du RG AMF et l’art. L. 214-98 CMF.
Branches 2 et 3 : non spécialement motivées (art. 1014, al. 2, CPC).
Le raisonnement et la solution
Visa décisif : art. 422-198 du RG AMF : “Le taux, l’assiette ou les autres éléments de la rémunération de la société de gestion peuvent être prévus par les statuts de la SCPI et, à défaut, une convention particulière approuvée par l’AGO fixe la rémunération.” (texte officiel AMF). AMF France
Conséquence : Lorsque la rémunération est fixée par les statuts, l’AG compétente peut modifier ces statuts ; aucun agrément de la société de gestion n’est requis, qui ne peut s’y opposer. Légifrance
Portée : La Cour confirme la lecture de la CA : la stipulation pour autrui n’a pas vocation à neutraliser le régime spécial de gouvernance des SCPI/SCPI-gestion prévu par le CMF et le RG AMF.
Rejet du pourvoi ; dépens et art. 700 CPC (3 000 €) à la charge d’Inter gestion.
3. Références juridiques
3.1 Jurisprudence
Cass. com., 17 sept. 2025, n° 24-14.271 (Inter gestion REIM c/ SCPI Pierre Investissement 6) – Rejet – Publié au Bulletin
3.2 Textes
Règlement général de l’AMF – art. 422-198 (note consolidée) :
“Le taux, l’assiette ou les autres éléments de la rémunération de la société de gestion peuvent être prévus par les statuts des SCPI (...). À défaut, les conditions précises de rémunération sont arrêtées par une convention particulière passée entre la société de gestion et la SCPI et approuvée par l’assemblée générale ordinaire.”
4. Analyse juridique approfondie
Clé de lecture : L’architecture CMF + RG AMF impose un binaire :
Statuts : ils peuvent fixer les éléments de rémunération de la société de gestion (art. 422-198 RG AMF).
À défaut : une convention spécifique, approuvée par l’AGO, détermine la rémunération.
Conséquence structurante : Quand les statuts servent de siège à la rémunération, l’organe souverain compétent pour les modifier (AGE/AG mixte selon statuts) peut faire évoluer ces éléments sans agrément de la société de gestion, puisque le texte spécial n’en prévoit aucun. La Cour consacre donc la primauté du mécanisme statutaire sur l’argument de stipulation pour autrui :
La stipulation pour autrui suppose un avantage irrévocable accepté par un tiers dans un cadre de droit commun.
Or, en matière de SCPI, un régime spécial organise qui fixe et qui modifie la rémunération. Le tiers-gérant accepte la gérance dans ce régime, incluant la mutabilité statutaire sous contrôle de l’assemblée.
Comparaison avec la jurisprudence antérieure :
Les décisions antérieures repérées portent plus largement sur la rémunération des dirigeants (SARL, etc.) ou des débats autour de clauses de type “stipulation pour autrui”, sans contrarier l’idée que le droit spécial prime (ex. lignes jurisprudentielles sur la soumission du bénéficiaire d’une stipulation pour autrui aux clauses de règlement des différends du contrat principal, ce qui illustre déjà une limitation fonctionnelle des effets de la stipulation ; v. par ex. Cass. 1re civ., 11 juill. 2006, n° 03-11.983).
CA Paris, 3 juin 2025, n° 22/06547, rappelle en substance que l’argument “stipulation pour autrui” ne surplombe pas un cadre légal spécial de gouvernance ; cohérence avec la solution du 17.09.2025.
Portée pratique :
Pour les SCPI dont la rémunération de la société de gestion figure dans les statuts, la voie adéquate de modification est statutaire (AGE/AG mixte selon les statuts), sans co-signature ni agrément de la société de gestion.
Si la rémunération résulte d’une convention (faute de stipulation statutaire), l’AGO compétente doit approuver la convention (ou son avenant). AMF France
5. Accompagnement personnalisé
Pour sécuriser vos statuts et/ou vos conventions de rémunération (SCPI, SEF, GFI), la SELARL Philippe GONET, avocat à Saint-Nazaire, peut :
Auditer vos statuts et documents de gouvernance (conformité CMF/RG AMF).
Rédiger les projets de résolutions (AGE/AGO) et avenants de rémunération.
Assister et plaider en cas de contestation (inopposabilité, abus de majorité, nullité d’AG, etc.).
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