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Le 16 janvier 2025, la Cour de cassation a rendu un arrêt significatif concernant la nullité d'un licenciement en lien avec l'exercice de la liberté d'expression du salarié. Cette décision s'inscrit dans une jurisprudence constante affirmant que, sauf abus, le salarié jouit, tant à l'intérieur qu'à l'extérieur de l'entreprise, de sa liberté d'expression. Toute restriction à cette liberté doit être justifiée par la nature de la tâche à accomplir et proportionnée au but recherché. Ainsi, un licenciement motivé, même partiellement, par l'exercice non abusif de cette liberté est considéré comme nul.
Résumé succinct
Contexte : Dans cette affaire, M. [W] [D] occupait le poste de directeur au sein de l'association [3] depuis le 20 janvier 2015. Il a été licencié le 30 novembre 2018. Contestant son licenciement, il a saisi la juridiction prud'homale, sollicitant l'annulation de son licenciement et sa réintégration, ou subsidiairement, la reconnaissance de l'absence de cause réelle et sérieuse de son licenciement.
Impact principal : La Cour de cassation a cassé partiellement l'arrêt de la cour d'appel, réaffirmant que le licenciement prononcé pour un motif lié à l'exercice non abusif par le salarié de sa liberté d'expression est nul. Cette décision renforce la protection des salariés contre les licenciements abusifs fondés sur l'expression de leurs opinions.
Analyse détaillée
Les faits : M. [D] a été engagé en tant que directeur par l'association [3] à partir du 20 janvier 2015. Le 30 novembre 2018, il a été licencié. Estimant que son licenciement était injustifié, il a saisi le conseil de prud'hommes pour en obtenir l'annulation et sa réintégration, ou à défaut, la reconnaissance de l'absence de cause réelle et sérieuse de son licenciement.
La procédure : Après le jugement du conseil de prud'hommes, les deux parties ont interjeté appel. La cour d'appel de Saint-Denis de La Réunion a rendu un arrêt le 24 mars 2022, confirmant partiellement le jugement de première instance. M. [D] s'est pourvu en cassation contre cette décision.
Contenu de la décision :
Arguments des parties :
M. [D] soutenait que son licenciement était nul, car fondé sur l'exercice de sa liberté d'expression.
L'association [3] arguait que le licenciement était justifié par une faute grave du salarié.
Raisonnement juridique de l’instance :
La Cour de cassation a rappelé que, sauf abus, le salarié jouit de sa liberté d'expression, tant à l'intérieur qu'à l'extérieur de l'entreprise. Elle a souligné que le licenciement prononcé pour un motif lié à l'exercice non abusif de cette liberté est nul.
Solution retenue : La Cour de cassation a cassé partiellement l'arrêt de la cour d'appel, en ce qu'il n'avait pas tiré les conséquences de l'absence d'abus dans l'exercice de la liberté d'expression par le salarié, et a renvoyé l'affaire devant la cour d'appel de Saint-Denis de La Réunion autrement composée.
Références et articles juridiques
Références exactes et vérifiables :
Cass. soc., 16 janv. 2025, n° 22-17.732.
Textes juridiques cités :
Article L.1121-1 du Code du travail : "Nul ne peut apporter aux droits des personnes et aux libertés individuelles et collectives de restrictions qui ne seraient pas justifiées par la nature de la tâche à accomplir ni proportionnées au but recherché."
Article 10 §1 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : "Toute personne a droit à la liberté d'expression. Ce droit comprend la liberté d'opinion et la liberté de recevoir ou de communiquer des informations ou des idées sans qu'il puisse y avoir ingérence d'autorités publiques et sans considération de frontières."
Analyse juridique approfondie
Raisonnement juridique : La Cour de cassation a réaffirmé que la liberté d'expression est une liberté fondamentale du salarié. Sauf abus, le salarié peut exprimer ses opinions, et seules des restrictions justifiées par la nature de sa tâche et proportionnées au but recherché peuvent être apportées. En l'espèce, la cour d'appel avait omis de tirer les conséquences de l'absence d'abus dans l'exercice de cette liberté par le salarié.
Conséquences juridiques :
Impact sur la jurisprudence existante : Cette décision s'inscrit dans la continuité de la jurisprudence protectrice de la liberté d'expression des salariés, rappelant que toute atteinte injustifiée à cette liberté entraîne la nullité du licenciement.
Évolution des pratiques ou interprétations du droit : Les employeurs doivent être vigilants et ne pas sanctionner un salarié pour l'exercice de sa liberté d'expression, sauf en cas d'abus caractérisé.
Critique des sources et de la décision
Décisions antérieures pertinentes :
Cass. soc., 23 juin 2021, n° 19-21.651
Résumé : La Cour de cassation a jugé qu'un motif tiré de la vie personnelle du salarié ne peut justifier un licenciement disciplinaire que s'il constitue un manquement de l'intéressé à une obligation découlant de son contrat de travail.
Implication : Cette décision souligne que l'exercice de la liberté d'expression par le salarié, même en dehors du cadre professionnel, est protégé, sauf en cas d'abus ou de manquement contractuel.
Cass. soc., 16 février 2022, n° 19-15.744
Résumé : La Cour a réaffirmé que, sauf abus, le salarié jouit, dans l'entreprise et en dehors de celle-ci, de sa liberté d'expression. Le licenciement prononcé pour un motif lié à l'exercice non abusif de cette liberté est nul.
Implication : Cette décision renforce la protection des salariés contre les licenciements fondés sur l'expression de leurs opinions, tant que cette expression ne dégénère pas en abus.
Cass. soc., 29 juin 2022, n° 20-16.060
Résumé : La Cour a annulé un licenciement en considérant qu'il sanctionnait l'exercice non abusif par le salarié de sa liberté d'expression, ce qui constitue une violation d'une liberté fondamentale.
Implication : Cette décision illustre la nullité des licenciements prononcés en raison de l'exercice légitime de la liberté d'expression par le salarié.
Cass. soc., 21 septembre 2022, n° 21-14.060
Résumé : La Cour a cassé un arrêt qui avait jugé le licenciement d'un salarié fondé sur une cause réelle et sérieuse, alors que les propos reprochés relevaient de sa liberté d'expression et n'étaient pas abusifs.
Implication : Cette décision rappelle que l'expression par le salarié de critiques ou de désaccords, dès lors qu'elle n'est pas abusive, ne peut justifier un licenciement.
Cass. soc., 20 mars 2024, n° 22-15.499
Résumé : La Cour a jugé que le licenciement prononcé, même en partie, en raison de l'exercice par le salarié de sa liberté d'expression, entraîne à lui seul la nullité du licenciement.
Implication : Cette décision renforce le principe selon lequel toute atteinte injustifiée à la liberté d'expression du salarié conduit à la nullité du licenciement.
Conclusion :
Ces décisions antérieures illustrent la position constante de la Cour de cassation en faveur de la protection de la liberté d'expression des salariés. Elles établissent que, sauf abus caractérisé, l'exercice de cette liberté ne peut constituer un motif légitime de licenciement, et toute sanction fondée sur une telle expression est susceptible d'être annulée pour violation d'une liberté fondamentale.
Cette actualité est associée aux catégories suivantes : Droit du travail