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1. Résumé succinct
Contexte : La Cour de cassation, première chambre civile, a rendu un arrêt de cassation le 9 octobre 2024 (n° 23-14.368), opposant l’État de Libye à la société turque Etrak Insaat, dans le cadre d’un contentieux relatif à l’exécution d’un accord transactionnel fondé sur un traité bilatéral d’investissement (TBI) entre la Turquie et la Libye.
Impact principal : L’arrêt apporte une clarification essentielle sur les conditions d’application temporelle et matérielle des TBI en arbitrage international, en affirmant que le différend invoqué doit découler directement d'un investissement postérieur à l'entrée en vigueur du traité.
2. Analyse détaillée
Les faits
L’accord initial concernait l’exécution de travaux publics en Libye par la société Etrak dans les années 1980. Un jugement libyen de 2012 condamne l’État de Libye à indemniser Etrak. Un protocole transactionnel est signé en 2013, mais la Libye ne l'exécute pas, ce qui mène la société turque à saisir un tribunal arbitral en 2016.
La procédure
Sentence arbitrale favorable à Etrak rendue à Genève le 22 juillet 2019 (CCI n° 22236/ZF/AYZ)
Ordonnance d’exequatur rendue à Paris le 21 janvier 2020
Appel formé par la Libye (CA Paris, 14 mars 2023)
Cassation par la Cour de cassation (9 octobre 2024)
Contenu de la décision
Arguments des parties
Libye : Le différend est antérieur à l'entrée en vigueur du TBI (2011), car il est issu des contrats des années 1980.
Etrak : L’accord transactionnel de 2013 constitue un nouveau différend autonome postérieur au TBI.
Raisonnement juridique
La Cour rappelle que les créances issues d'un accord transactionnel ne sont qualifiées d'"investissement" au sens de l'article 1, 2, b) du TBI que si elles sont directement liées à un investissement.
Le protocole de 2013 ne crée pas un nouveau différend autonome mais est la conséquence directe du litige d’origine (travaux de 1980).
Le litige ne remplit donc pas les conditions temporelles et matérielles du TBI.
Solution retenue
La Cour casse l’arrêt d’appel en toutes ses dispositions et renvoie l’affaire devant une autre formation de la cour d'appel de Paris.
3. Références et articles juridiques
Jurisprudence
Cass. civ. 1re, 9 oct. 2024, n° 23-14.368, Légifrance
Textes cités
Code de procédure civile :
Article 1520, 1° : "Le recours en annulation n'est ouvert que si le tribunal arbitral s'est déclaré à tort compétent ou incompétent." Article 1525 : fixe les règles de l’examen du recours en annulation.
TBI Turquie-Libye du 25 novembre 2009 (entrée en vigueur le 22 avril 2011) :
Article 1, 2, b) : "Les créances financières doivent être liées à un investissement pour bénéficier de la protection du traité." Article 8.4 : "Seuls les différends découlant directement des investissements sont arbitrables." Article 10 : "Le traité ne s’applique pas aux différends nés avant son entrée en vigueur."
4. Analyse juridique approfondie
La décision rappelle la double condition d'application d'un TBI :
Temporalité : le différend doit naître après l’entrée en vigueur du TBI.
Lien direct avec un investissement : le litige doit résulter directement d'un investissement.
En l’espèce, le protocole de 2013 ne suffisait pas à déconnecter le contentieux de ses origines antérieures (années 1980). L’exécution d’une transaction issue d’un litige précédent n’est pas assimilable à un nouveau litige protégé par le TBI. Cette décision s’inscrit dans une jurisprudence constante de la Cour visant à contrôler rigoureusement les conditions d’arbitrabilité.
5. Accompagnement juridique
Pour toute question ou contentieux en droit international ou arbitrage : La SELARL Philippe GONET, cabinet d’avocats expérimenté, vous accompagne dans :
L’analyse et l’exécution de sentences arbitrales
La contestation de l’exequatur
L’évaluation de l’applicabilité des TBI
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