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Assurance incendie : l’assuré peut saisir le juge sans attendre six mois si l’assureur refuse sa garantie

Le 08 mai 2025
Assurance incendie : l’assuré peut saisir le juge sans attendre six mois si l’assureur refuse sa garantie
assurance incendie – article L. 122-2 code des assurances – nullité contrat assurance – expertise amiable – refus de garantie – état des pertes – recevabilité action judiciaire – fausse déclaration – assurance du crédit mutuel – jurisprudence 2025 – Cassa

1. Résumé succinct

Contexte : La Cour de cassation, deuxième chambre civile, s’est prononcée le 13 mars 2025 (pourvoi n° 23-10.961) dans un litige opposant la société Assurances du Crédit mutuel IARD à un assuré commerçant, à la suite d’un sinistre incendie survenu en janvier 2019.

Nature du litige : L’assureur avait refusé sa garantie pour fausse déclaration. L’assuré l’avait assigné en justice avant l’expiration du délai de six mois prévu par l’article L. 122-2 du Code des assurances.

Impact principal : La Cour confirme que ce délai de six mois n’est pas opposable à l’assuré lorsque l’assureur a explicitement refusé sa garantie. Elle valide donc la recevabilité immédiate de l’action judiciaire, précisant une exception importante au régime procédural applicable en matière d’assurance incendie.


2. Analyse détaillée

Les faits
M. [Y], exploitant d’un café-bar-restaurant, avait souscrit un contrat d’assurance incendie auprès de la société Assurances du Crédit mutuel IARD. Un incendie est survenu dans les locaux assurés le 11 janvier 2019. Invoquant une fausse déclaration intentionnelle (article L. 113-8 du Code des assurances), l’assureur a refusé sa garantie.

La procédure
Le 6 juillet 2020, M. [Y] a assigné l’assureur pour faire constater l’absence de fausse déclaration et obtenir indemnisation. La cour d’appel de Nancy (arrêt du 23 novembre 2022, n° 21/02324) a jugé la demande recevable et condamné l’assureur.

L’assureur a formé pourvoi en cassation, invoquant la prématurité de l’action, puisque l’état des pertes n’avait été remis que postérieurement à l’assignation.

Le contenu de la décision

Arguments des parties
Assureur : L’action était prématurée au regard de l’article L. 122-2 C. assur., faute de respect du délai de six mois après la remise de l’état des pertes.
Assuré : L’action visait à contester un refus de garantie, ce qui rendait le délai inapplicable.

Raisonnement de la Cour
La Cour rappelle que :

« Les parties ne sont pas recevables à saisir le juge avant l’expiration d’un délai de six mois suivant la remise de l’état des pertes, sauf si l’expertise amiable a pris fin avant ce délai. »
Mais elle ajoute que :

« Lorsque l’assureur a fait connaître son refus de garantie, l’assuré peut saisir le juge pour contester cette décision sans être tenu de respecter la procédure prévue par l’article L. 122-2 du Code des assurances. »
Elle substitue d’office ce fondement juridique au raisonnement retenu par la cour d’appel (article 1015 CPC).

Solution retenue
La Cour rejette le pourvoi : la demande de l’assuré était recevable, même avant la remise de l’état des pertes, dès lors que l’assureur avait opposé une exception de nullité du contrat fondée sur une prétendue fausse déclaration.


3. Références et articles juridiques
Texte applicable
Article L. 122-2 du Code des assurances :

« Les dommages matériels résultant directement d'un incendie ou du commencement d'un incendie sont seuls à la charge de l'assureur, sauf convention contraire. [...] Si, dans les trois mois à compter de la remise de l'état des pertes, l'expertise n'est pas terminée, l'assuré a le droit de faire courir les intérêts par sommation ; si elle n'est pas terminée dans les six mois, chacune des parties peut procéder judiciairement. »

Jurisprudence citée
Cass. com., 22 oct. 1996, n° 93-18.929, Bull. 1996, IV, n° 243 (cassation) – ???? source officielle Légifrance

4. Analyse juridique approfondie

Raisonnement juridique

La Cour distingue deux régimes procéduraux :

En cas d'expertise amiable classique : délai de six mois obligatoire après remise de l’état des pertes.
En cas de refus de garantie (notamment pour fausse déclaration) : pas de délai d’attente imposé à l’assuré pour saisir le juge.
Cette lecture évite qu’un assureur puisse bloquer l’accès au juge par la seule absence d’état des pertes, dès lors qu’il conteste purement et simplement sa garantie. Elle renforce la sécurité juridique et la protection de l’assuré.

Conséquences juridiques
Clarification sur les exceptions au délai de six mois prévu à l’article L. 122-2 C. assur.
Encadrement de la mauvaise foi potentielle de l’assureur en cas de refus de garantie.
Renforcement des droits procéduraux des assurés en matière d’assurance incendie.

5. Critique de la décision

La décision constitue une clarification importante dans l’articulation entre les articles L. 122-2 et L. 113-8 du Code des assurances. Elle réaffirme une hiérarchie fonctionnelle entre les dispositions procédurales et les exceptions fondées sur le fond du droit (refus pour nullité).

L’arrêt sécurise le droit d’accès au juge dès lors que la garantie est niée en amont, sans nécessiter la mise en œuvre de l’expertise amiable ou la production préalable de l’état des pertes.

6. Accompagnement juridique

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