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Installée 2 rue du Corps de Garde, 44600 Saint-Nazaire, la SELARL PHILIPPE GONET intervient notamment en droit de la famille, droit immobilier et en contentieux patrimonial, avec une pratique orientée vers l’analyse stratégique des décisions et la sécurisation des démarches.
Dans les dossiers touchant aux personnes vulnérables, l’enjeu est très concret : sécuriser la gestion (comptes, paiements, loyers) et réduire les risques de contestation.
1) Résumé
Juridiction / chambre : Cour de cassation, 1re chambre civile
Nature : avis sur saisine (demande d’avis)
Date : 5 décembre 2025
N° pourvoi : 25-70.019
Décision attaquée : Tribunal judiciaire d’Aurillac, 14 août 2025
Parties impliquées
L’avis est rendu dans une instance concernant “Mme [L]” (anonymisée). Légifrance
Le demandeur de l’avis : tribunal judiciaire d’Aurillac (juge des tutelles / contentieux de la protection).
Nature du litige (la question posée)
Le juge des tutelles peut-il autoriser, “dans le cadre d’un mandat rémunéré”, que des fonds destinés au majeur protégé transitent d’abord sur un compte au nom du mandataire, avant d’être reversés sur un compte au nom du majeur protégé ?
Effet direct de l’avis (impact pratique)
La Cour répond non :
Aucun paiement/encaissement (ex. loyers) ne peut être confié à un tiers si cela implique qu’il manipule les fonds ;
Les loyers (et plus largement les sommes d’argent) doivent partir d’un compte ou arriver sur un compte ouvert au nom de la personne protégée, sans transit par le compte d’un tiers (ni même par celui du tuteur/curateur).
2) Analyse détaillée
A. Les faits
Limite documentaire : un avis “sur saisine” ne décrit pas le conflit factuel (baux, agence, montants, etc.). Seuls les éléments procéduraux et la question juridique sont publiés.
14 août 2025 : le tribunal judiciaire d’Aurillac forme une demande d’avis.
5 septembre 2025 : la Cour de cassation reçoit la demande.
2 décembre 2025 : la demande est examinée en séance.
5 décembre 2025 : l’avis est rendu et mis à disposition.
Publication annoncée au Journal officiel (art. 1031-6 CPC).
B. La procédure
Procédure spéciale : demande d’avis (articles L. 441-1 s. COJ et 1031-1 s. CPC).
Il ne s’agit pas d’un pourvoi “classique” : pas de 1re instance / appel / cassation sur le fond du litige dans le texte publié ; la Cour répond à une question de droit posée par la juridiction saisie.
C. Contenu de la décision
1) Arguments des parties
Non publiés dans l’avis (aucun développement sur les positions des parties, hormis la question).
2) Raisonnement de la Cour
La Cour articule trois textes et en tire une conséquence pratique :
Art. 452 C. civ. : la tutelle/curatelle est une charge personnelle, mais le tuteur/curateur peut s’adjoindre le concours de tiers pour certains actes listés par décret.
Décret du 22 déc. 2008, art. 3 : les tiers peuvent intervenir pour des actes conservatoires et certains actes d’administration à condition que ces actes n’emportent ni paiement ni encaissement.
Art. 427, al. 5 C. civ. : les opérations d’encaissement/paiement/gestion patrimoniale se font exclusivement via des comptes ouverts au nom de la personne protégée.
Conséquences :
Un mandat (même rémunéré) peut viser la gestion immobilière (actes conservatoires / administration), mais il ne peut jamais inclure la perception de revenus ou le paiement de sommes pour le majeur protégé.
Donc les loyers doivent être encaissés directement sur un compte au nom du majeur protégé ; et les paiements doivent partir directement de ce compte.
Le juge des tutelles ne peut pas autoriser un schéma où un tiers encaisse/paye ; et la Cour ajoute que le tuteur/curateur ne peut pas davantage organiser un transit “hors compte” (ex. encaissement sur un autre compte puis reversement).
Rappel : l’ouverture d’une tutelle révoque les mandats antérieurs (art. 2003 C. civ.).
3) Solution retenue (dispositif)
La Cour dit être d’avis que le juge des tutelles ne peut pas autoriser le concours d’un tiers avec une mission ayant pour objet/effet de percevoir des revenus ou de payer des sommes pour la personne protégée (et ne peut pas autoriser directement le tiers).
3) Références juridiques
3.1 Jurisprudence
A) Décision analysée
Cass. civ. 1re, avis, 5 déc. 2025, n° 25-70.019
B) Jurisprudence antérieure
CA Paris, 28 juin 2022, n° 19/100727 (évoque la critique d’encaissements de loyers transitant par les comptes des agences agissant “en délégation du tuteur”).
C) Jurisprudence antérieure cohérente sur l’exigence “compte au nom du majeur” (sans viser nécessairement une agence)
CA Rennes, 15 sept. 2015, n° 14/04350 (curatelle renforcée : revenus reçus sur “un compte ouvert au nom” du majeur).
Recherche “toutes jurisprudences antérieures sur le même objet” – résultat vérifiable à date : sur Légifrance, les décisions identifiées et directement pertinentes sur le point “transit des fonds/loyers via compte d’un tiers mandaté” sont limitées ; aucune décision antérieure de la Cour de cassation sur exactement ce schéma n’a été retrouvée de manière certaine via les requêtes ciblées effectuées ici (sans inventer de références).
3.2 Textes légaux
Code civil – article 452 (version en vigueur depuis 01/01/2009) : “La curatelle et la tutelle sont des charges personnelles…”
Code civil – article 427 (alinéa 5) (version en vigueur depuis 01/01/2020) : “Les opérations bancaires… sont réalisées exclusivement…”
Décret n° 2008-1484 du 22 décembre 2008 – article 3 (concours de tiers ; réserve “ni paiement ni encaissement…”)
Code civil – article 2003 (fin du mandat : “mort, tutelle des majeurs…”)
4) Analyse juridique approfondie
4.1 Le cœur du raisonnement : “gestion” oui, “maniement des fonds” non
La Cour opère une séparation nette :
Gestion immobilière possible via un tiers (ex. rédaction/renouvellement de baux, démarches conservatoires, actes d’administration) si ces actes ne comportent pas la manipulation des fonds.
Encaissement/paiement interdit au tiers : la réserve du décret (“ni paiement ni encaissement”) et l’exclusivité de l’article 427 conduisent à exclure :
perception de loyers par un gestionnaire,
paiement de charges/travaux par un tiers,
et tout montage avec transit sur le compte d’un mandataire (même “identifié” au nom du majeur).
4.2 Ce que l’avis change concrètement dans les pratiques
Pour les familles, tuteurs, curateurs et professionnels :
Fin des “comptes de passage” : l’étiquette “au nom du majeur” sur un virement entrant sur le compte du mandataire ne suffit pas.
En gestion locative, il faut privilégier des schémas où :
le locataire paie directement sur un compte au nom du majeur protégé,
et les dépenses sont réglées par le tuteur/curateur depuis ce compte.
4.3 Mise en perspective avec la jurisprudence antérieure
La CA Paris (2022) montre que la question “agences immobilières déléguées” et “loyers transitant par leurs comptes” existait déjà en contentieux, notamment sous l’angle d’un contrôle/tolérance critiquée dans une mesure de protection.
L’avis de 2025 a une portée structurante : il clarifie la lecture combinée 452 + décret + 427, et ferme la porte à toute autorisation judiciaire destinée à “rendre licite” un transit.
La CA Rennes (2015) illustre une logique convergente : centraliser les revenus sur un compte au nom du majeur (idée de traçabilité et de protection).
5) Critique de la décision
Point fort : l’avis donne un raisonnement complet (textes, articulation, conséquences).
Point faible : l’absence de faits détaillés limite la transposition “cas par cas” (on ne connaît pas le mandat concret).
La règle opérationnelle ressort clairement : les fonds de la personne protégée ne doivent pas transiter par le compte d’un tiers (et l’avis le formule expressément via la combinaison des textes).
6) Accompagnement personnalisé (droit de la famille / protection)
Si vous êtes tuteur, curateur, proche d’un majeur protégé ou si vous subissez un blocage bancaire/locatif (loyers, paiements de charges, mandat de gestion), un audit juridique permet souvent d’éviter des contestations ultérieures (comptes de gestion, responsabilités, régularisation des circuits de paiement).
La SELARL PHILIPPE GONET, avocat à Saint-Nazaire, peut notamment :
sécuriser la mise en conformité de la gestion (loyers, dépenses, mandats) ;
vous assister devant le juge des tutelles / JCP en cas de difficulté ;
préparer une stratégie probatoire en cas de contestation de comptes ou de responsabilité.
Cette actualité est associée aux catégories suivantes : Droit des tutelles et autres mesures de protection