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1. Résumé succinct
Contexte :
Plusieurs associations de défense des droits des détenus (OIP-SF, LDH, A3D), des syndicats (CGT SPIP, SNEPAP-FSU) et l’association Le CRI ont attaqué une instruction ministérielle du 19 février 2025 interdisant l'organisation d'activités « ludiques ou provocantes » dans les établissements pénitentiaires.
Juridiction : Conseil d’État, 10e-9e chambres réunies.
Nature du litige : Excès de pouvoir contre une instruction administrative en matière pénitentiaire.
Impact principal : Le Conseil d’État annule partiellement l’instruction, jugeant illégale l’interdiction générale des activités à caractère « ludique ».
2. Analyse détaillée
Les faits
Par une instruction du 19 février 2025, le ministre de la Justice a interdit aux établissements pénitentiaires de proposer des activités ayant un caractère « ludique ou provocant ». Cette décision a été contestée par plusieurs associations et syndicats au motif qu’elle porterait atteinte aux droits fondamentaux des personnes détenues et à l’objectif de réinsertion inscrit dans le Code pénitentiaire.
La procédure
Requérants : OIP-SF, CGT SPIP, SNEPAP-FSU, Syndicat de la magistrature (irrecevable), Le CRI, LDH, A3D.
Date de la requête : 13 mars 2025.
Audience publique : Rapporteur : Mme Alexandra Poirson ; Rapporteur public : M. Frédéric Puigserver.
Avocat des requérants : SCP Spinosi.
Lecture : 19 mai 2025.
Contenu de la décision
Arguments des parties
Les requérants dénoncent :
Une atteinte aux droits fondamentaux des personnes détenues ;
Une méconnaissance des objectifs de réinsertion ;
Une restriction non justifiée au regard des dispositions du Code pénitentiaire et de la Convention européenne des droits de l’homme.
Raisonnement juridique du Conseil d’État
Recevabilité : L’instruction est susceptible d’avoir des effets notables sur les droits des détenus et du personnel pénitentiaire. Toutefois, le Syndicat de la magistrature est écarté faute d’intérêt à agir propre.
Fond de l’analyse :
L’interdiction générale d’activités « ludiques » est contraire aux articles L. 411-1 et R. 411-1 du Code pénitentiaire, qui reconnaissent explicitement les activités éducatives, culturelles, socioculturelles, sportives, etc.
En revanche, la mention des activités « provocantes » est validée, car elle vise à protéger le respect dû aux victimes, sans excès de pouvoir.
Solution retenue
Annulation des seuls mots « ludique ou » dans l’instruction du 19 février 2025. Rejet pour le surplus.
3. Références et articles juridiques
Décision analysée
Conseil d’État, 10e-9e ch. réunies, 19 mai 2025, n° 502367
Textes juridiques cités
Code pénal, art. L. 130-1
« [...] la peine a pour fonctions : 1° De sanctionner l'auteur de l'infraction ; 2° De favoriser son amendement, son insertion ou sa réinsertion. »
Code de procédure pénale, art. 707 II
« Le régime d'exécution des peines [...] vise à préparer l'insertion ou la réinsertion [...] »
Code pénitentiaire :
Art. L. 411-1 : obligation d'exercer une activité adaptée à la réinsertion.
Art. R. 411-1 : liste des domaines d’activités admises.
Art. R. 411-8 : participation à des jeux sans gain autorisée.
Art. D. 414-3 : activités socioculturelles obligatoires.
Art. R. 414-7 : accès aux activités sportives.
4. Analyse juridique approfondie
Le Conseil d’État distingue soigneusement :
Ce qui relève de la compétence du ministre : encadrer l’organisation des activités pénitentiaires.
Ce qui dépasse cette compétence : interdire par principe un type d’activité, sans considération du contenu ou des objectifs.
L’interdiction du caractère ludique méconnaît les finalités légales de la peine (réinsertion), et la possibilité légale d'organiser des jeux (R. 411-8 CPPeni). La mention des activités « provocantes », quant à elle, repose sur une justification légitime en lien avec l’intérêt des victimes.
Conséquences juridiques
Portée jurisprudentielle : cette décision renforce le contrôle du juge administratif sur les instructions ministérielles internes dès lors qu’elles produisent des effets significatifs.
Évolution des pratiques : l’administration pénitentiaire devra respecter les objectifs de réinsertion, y compris par le biais d’activités à visée ludique ou culturelle.
5. Critique des sources et de la décision
Cette décision isole et censure une restriction disproportionnée, mais laisse intacte la possibilité pour l’administration de restreindre certains contenus d’activités pour des raisons de dignité et de sécurité.
6. Accompagnement juridique
La SELARL Philippe GONET, cabinet d’avocat expérimenté à Saint-Nazaire, est à votre disposition pour :
Vous accompagner dans la contestation des mesures réglementaires internes ;
Défendre les droits des personnes détenues ;
Analyser la conformité des politiques pénitentiaires aux normes nationales et européennes.
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