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Ascendant à charge : la CJUE valide la prise en compte de documents anciens

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Ascendant à charge : la CJUE valide la prise en compte de documents anciens
CJUE – droit au séjour – ascendant à charge – directive 2004/38 – regroupement familial – citoyen de l’Union – carte de séjour – documents anciens – séjour irrégulier – jurisprudence européenne – droit des étrangers – droit de la famille

1. Résumé succinct

Contexte : La Cour de justice de l’Union européenne (CJUE) était saisie d’un renvoi préjudiciel par le Conseil d’État belge concernant l’interprétation de la directive 2004/38/CE sur la libre circulation des citoyens de l’Union et de leurs familles. Le litige opposait une ressortissante marocaine (XXX), mère du partenaire belge d’une citoyenne néerlandaise résidant en Belgique, à l’État belge, après plusieurs rejets de demande de carte de séjour.

Impact principal : La Cour précise la date à laquelle doit être appréciée la condition d’ascendant « à charge » pour l’octroi d’un droit de séjour. Elle juge que la dépendance doit être démontrée tant à la date du départ du pays d’origine qu’à la date de la demande de séjour, même si celle-ci est tardive. Le séjour irrégulier ne fait pas obstacle à ce droit si la dépendance est établie.


2. Analyse détaillée

a. Les faits

XXX, ressortissante marocaine, entre en Belgique en 2011 avec un visa néerlandais, puis dépose plusieurs demandes de carte de séjour au titre du regroupement familial, fondées d’abord sur son lien avec son fils belge, puis avec la partenaire néerlandaise de ce dernier. Toutes sont rejetées, notamment pour défaut de preuve de la dépendance matérielle au moment de la demande.

b. La procédure

Après plusieurs rejets successifs par les autorités belges et les juridictions nationales (dont un arrêt du Conseil du contentieux des étrangers en 2016), XXX saisit le Conseil d’État. Celui-ci interroge la CJUE sur la notion de dépendance dans le temps, la régularité du séjour, et la recevabilité de documents anciens.

c. Contenu de la décision

Arguments des parties :

XXX soutenait que la notion de « dépendance » devait s’apprécier de manière souple dans le temps, et que des documents anciens étaient valides.
L’État belge invoquait l’absence de lien de dépendance actualisé et la condition de séjour régulier.


Raisonnement juridique :

La Cour rappelle le caractère déclaratif de la carte de séjour (art. 10 Dir. 2004/38) et la nécessité d’établir un droit préexistant de séjour.
Elle affirme que la dépendance doit être démontrée tant au moment du départ du pays d’origine qu’au moment de la demande, même si plusieurs années se sont écoulées entre les deux.
Elle précise qu’un séjour irrégulier ne prive pas de la possibilité de se prévaloir du statut de « membre de la famille » si les conditions matérielles du droit au séjour sont remplies.
Solution retenue :
La CJUE impose une double vérification de la condition de dépendance (à l’entrée et à la demande), même en cas de séjour irrégulier, et valide la recevabilité de documents anciens pour établir cette dépendance.


3. Références et articles juridiques

Référence de l’arrêt :
CJUE, 10 avril 2025, aff. C-607/21, XXX c. État belge

Textes cités :

Directive 2004/38/CE :

« Est membre de la famille […] d) l’ascendant direct à charge du citoyen de l’Union et/ou de son partenaire » (art. 2, point 2, d).
« Le droit de séjour est constaté par la délivrance d’un document […] dans les six mois » (art. 10, §1).
CJUE, arrêt Jia, 9 janv. 2007, aff. C-1/05.
CJUE, arrêt Chief Appeals Officer, 21 déc. 2023, aff. C-488/21.


4. Analyse juridique approfondie

Raisonnement de la CJUE :

La Cour renforce une lecture stricte et téléologique de la directive : seuls les ascendants effectivement à charge, avant et pendant leur séjour, peuvent bénéficier d’un droit dérivé. Elle souligne l’importance du contrôle par les États, sans pour autant permettre un refus fondé sur la seule irrégularité administrative du séjour.

Conséquences juridiques :

Élargissement de la reconnaissance du droit au séjour pour des ascendants en situation irrégulière si la dépendance est doublement prouvée.
Sécurisation des demandes fondées sur des documents anciens.
Limitation du pouvoir d’appréciation discrétionnaire des États membres sur la notion d’« à charge ».

5. Critique de la décision

CJUE, Jia, C-1/05
CJUE, Reyes, C-423/12
CJUE, Diallo, C-246/17
CJUE, Chief Appeals Officer, C-488/21

→ Confirmation de l’importance du critère de dépendance matérielle dans l’acquisition du statut de membre de la famille. Cette dépendance ne doit pas être fictive ni seulement déclarative.

→ Double exigence : situation dans le pays d’origine et au moment de la demande. Validité des documents anciens réaffirmée.

6. Accompagnement juridique


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