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Le juge de l'exécution peut contester la cause d’un chèque impayé

Le 02 juin 2025
Le juge de l'exécution peut contester la cause d’un chèque impayé
chèque impayé – titre exécutoire – huissier – certificat de non-paiement – contestation saisie – juge de l’exécution – L. 131-73 CMF – absence de cause – cassation – recours JEX

1. Résumé succinct
Juridiction : Cour de cassation, 2e chambre civile
Date : 22 mai 2025
Pourvoi : n° 22-15.566
Décision : Cassation
Contexte : Contestation, par le tireur d’un chèque impayé, d’une mesure d’exécution forcée fondée sur un titre exécutoire établi par huissier.
Impact : La Cour affirme que le juge de l’exécution peut contrôler la cause du chèque ayant donné lieu à un titre exécutoire fondé sur l'article L. 131-73 CMF.

2. Analyse détaillée

 Les faits
En exécution d’un protocole transactionnel, M. [X] [Y] remet un chèque à M. [B].
Il forme opposition pour perte, mais le chèque est présenté à l’encaissement en décembre 2019.
Le chèque revient impayé ; la banque émet un certificat de non-paiement le 7 octobre 2020.
Un titre exécutoire est établi par huissier le 26 octobre 2020, et une saisie-attribution est pratiquée le lendemain.
M. [X] [Y] saisit le juge de l’exécution pour contester le chèque et la procédure.

La procédure
Le JEX annule le chèque, le titre et la saisie.
La cour d’appel de Paris (3 mars 2022) infirme cette décision et écarte les prétentions du débiteur.
La 2e chambre civile de la Cour de cassation renvoie deux questions préjudicielles à la chambre commerciale, par arrêt du 28 mars 2024.
L’avis de la chambre commerciale est rendu le 20 novembre 2024, et suivi dans la présente décision du 22 mai 2025.

Contenu de la décision
Arguments du demandeur (M. [X] [Y]) :
Le JEX peut contrôler la validité du chèque et opposer l’absence de cause à l’exécution forcée, même si le titre provient d’un huissier (et non d’un juge).

Raisonnement de la Cour de cassation :
Art. L. 131-25 CMF : Le principe d’inopposabilité des exceptions ne vaut pas entre tireur et bénéficiaire direct.
Art. L. 131-73 CMF : Le titre exécutoire n'est pas une décision de justice.
Art. L. 213-6 COJ : Le juge de l'exécution peut connaître des contestations sur les titres exécutoires, y compris leur cause.

Solution retenue :
La Cour casse l'arrêt d'appel au visa de ces textes. Le JEX pouvait statuer sur l’exception tirée de l’absence de cause du chèque.

3. Références et articles juridiques
Textes cités :
Article L. 131-25 CMF :
"Les personnes actionnées en vertu du chèque ne peuvent pas opposer au porteur les exceptions fondées sur leurs rapports personnels avec le tireur ou avec les porteurs antérieurs, à moins que le porteur, en acquérant le chèque, n'ait agi sciemment au détriment du débiteur."

Article L. 131-73 CMF :
"...L'huissier de justice qui n'a pas reçu justification du paiement... délivre, sans autre acte de procédure ni frais, un titre exécutoire."

Article L. 111-3, 5° CPCE :
"Sont titres exécutoires : [...] le titre délivré par un huissier de justice en cas de non-paiement d’un chèque."

Article L. 213-6 COJ :
"Le juge de l'exécution connaît des difficultés relatives aux titres exécutoires et des contestations qui s'élèvent à l'occasion de l'exécution forcée, même si elles portent sur le fond du droit."


4. Analyse juridique approfondie

Raisonnement juridique

La Cour rappelle que le titre exécutoire fondé sur un certificat de non-paiement n’est pas une décision judiciaire mais un acte authentique unilatéral d’huissier, permettant au juge de l'exécution d’en contrôler la validité, y compris la cause du chèque.

Conséquences juridiques
Élargissement du contrôle du JEX : Il peut apprécier la cause du chèque, contrairement à ce qu’avait retenu la cour d’appel.
Réaffirmation du rôle du juge de l’exécution dans le cadre de l'article L. 213-6 COJ.
Clarification de l’office du JEX vis-à-vis des titres émis sur le fondement de l’article L. 131-73 CMF.

5. Critique de la décision

Cette décision s’inscrit dans un courant de jurisprudence récent clarifiant l’office du JEX.

Confirme une évolution doctrinale vers un accès plus large au contrôle juridictionnel des actes d’huissiers, malgré leur valeur exécutoire.

Met en lumière la distinction fondamentale entre titre exécutoire judiciaire et titre exécutoire d’huissier.

Valide la cohérence des textes cités et leur application stricte aux faits de l’espèce.

6. Accompagnement juridique
Pour toute procédure impliquant un chèque impayé, un titre exécutoire non judiciaire ou une saisie-attribution contestée, l’analyse des recours pertinents par un avocat est cruciale.

La SELARL Philippe GONET, cabinet d’avocat expérimenté à Saint-Nazaire, vous accompagne pour :

Examiner la validité d’un chèque ou d’un titre exécutoire.
Contester une saisie.
Défendre vos intérêts devant le JEX

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