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Honoraires d’avocat : compétence du premier président strictement encadrée

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Honoraires d’avocat : compétence du premier président strictement encadrée
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Résumé succinct

Contexte : Dans une affaire relative à la restitution d’une provision d’honoraires versée à un premier avocat, le premier président de la cour d’appel de Fort-de-France avait condamné le second avocat, reprenant la procédure après le départ à la retraite du premier, à restituer cette somme à la cliente.

Juridiction : Cour de cassation, 2e chambre civile

Nature du litige : Compétence du premier président dans une procédure de taxation d’honoraires – détermination du débiteur de la restitution

Impact : Confirmation du périmètre strict de compétence du premier président dans la procédure de taxation d’honoraires (article 174 du décret n° 91-1197 du 27 novembre 1991) : il ne peut statuer sur l’identité du débiteur de la restitution des honoraires, même à titre incident.


Analyse détaillée

1. Les faits

Mme [T] avait versé une provision de 1 627,50 € à son avocate initiale, Mme [C], dans le cadre d’une procédure de divorce.
À la suite du départ à la retraite de cette dernière, Mme [N], autre avocate, reprend le dossier.
Mme [T] saisit le bâtonnier pour demander le remboursement des honoraires à Mme [N], estimant que cette dernière avait pris la suite du dossier.

2. La procédure

Saisine du bâtonnier : en date du 19 septembre 2022.
Saisine du premier président : après absence de réponse du bâtonnier.
Ordonnance attaquée : 20 septembre 2023, par le premier président de la cour d’appel de Fort-de-France.
Pourvoi en cassation : formé par Mme [N] (avocate) contre cette ordonnance.

3. Contenu de la décision

Arguments de Mme [N] (demanderesse au pourvoi)

Le premier président n’a pas compétence pour statuer sur l'identité du débiteur d’une obligation de restitution d’honoraires.
Il aurait excédé ses pouvoirs en condamnant Mme [N] sur ce fondement.

Raisonnement de la Cour de cassation
Textes applicables :

Article 10 de la loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971.


Article 174 du décret n° 91-1197 du 27 novembre 1991.

Le pouvoir du premier président est limité aux contestations relatives au montant et au recouvrement des honoraires.
Il ne peut statuer sur le débiteur de l’obligation de restitution, même à titre accessoire.

Solution retenue
Cassation partielle de l’ordonnance du premier président.
Renvoi devant un autre président de la cour d’appel de Fort-de-France.

Références et articles juridiques
Textes législatifs et réglementaires cités
Article 10 de la loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971 :

« Les honoraires de consultation, d'assistance, de conseil, de rédaction d'actes juridiques sous seing privé et de plaidoirie sont fixés en accord avec le client. […] »

Article 174 du décret n° 91-1197 du 27 novembre 1991 :

« Le premier président de la cour d’appel connaît des recours contre les décisions rendues par le bâtonnier en matière de contestation d’honoraires. »

Analyse juridique approfondie

Raisonnement retenu par la Cour

La Cour procède à une lecture stricte des textes : le décret de 1991 crée une procédure spécifique, qui ne permet ni l’imputation de responsabilité, ni la désignation du débiteur des restitutions. Le juge ne peut donc tirer de la reprise du dossier par un avocat une obligation implicite de rembourser les honoraires perçus par un prédécesseur.

Conséquences juridiques

Clarification de la compétence du premier président : pas de pouvoir juridictionnel pour statuer sur une question de responsabilité ou de transmission d'obligation d’un avocat à un autre.
Encadrement strict des recours du client : le client doit agir devant la juridiction civile compétente pour obtenir une éventuelle restitution ou réparation.

Critiques de la décision

A confirmé la pertinence et la constance de la jurisprudence sur la compétence du premier président en matière de contestation d’honoraires.

Relève que cette décision évite un glissement de compétence préjudiciable aux principes du procès équitable et de la sécurité juridique. Elle rappelle que la procédure de taxation n’est pas un tribunal du contentieux contractuel ou déontologique.

Synthèse : seul le juge du fond peut statuer sur les obligations de remboursement d’un avocat successeur.
Implication : recours devant un juge civil de droit commun en cas de litige sur la dette.

L'arrêt Cass. civ. 2e, 19 juin 2025, n° 23-23.781, apporte une clarification importante sur la compétence du premier président de cour d’appel dans les procédures de taxation d’honoraires. En rappelant que ce magistrat ne peut statuer, même à titre incident, sur le débiteur d’une obligation de restitution, la Cour de cassation protège les principes de sécurité juridique et de séparation des compétences. Cette décision s’inscrit dans une jurisprudence constante et confirme que les litiges relatifs à la qualité de débiteur doivent être portés devant le juge du fond.

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